Quand nous avons démarré notre projet de potager en permaculture, c’était une idée un peu folle. Nous avons attiré des regards curieux mais aussi et surtout dubitatifs. Les gens du village connaissent bien cet endroit où nous habitons. “C’est une mauvaise terre !”. Certains nous ont même avoué aujourd’hui ce qu’ils avaient pensé à nos débuts : “Ils ne s’en sortiront jamais !”. Et pourtant, nous étions persuadés que ce terrain pouvait être bien plus que ce qu’on en avait fait. Que ce soit pour nous ou pour la nature, nous devions améliorer les choses. C’était parti pour l’aventure sur ce terrain à l’apparence hostile.
Nous avons effectivement démarré avec un terrain de 14 ares qui avait été exploité pendant des décennies uniquement pour du bois (des peupliers). Ce terrain était attenant à notre propriété actuelle de 8 ares à laquelle nous y avons ajouté ces 14 ares.
Se situant sur un ancien lit de rivière, il avait été délaissé par les fermiers. Le sol était considéré comme “mauvais” puisque les lourdes machines agricoles s’y embourbaient. C’était un milieu “pauvre” où ne poussaient en sous-bois que des orties, des ronces, quelques iris. Il était presque impénétrable sans machette. Bref, pas forcément gagné pour y démarrer un potager. Et pourtant, nous y sommes parvenus. Comment ? On vous dit tout dans cet article….
Le terrain d’origine de notre futur
Sur cette photo, vous avez un aperçu du terrain avant que nous ne commencions les aménagements.
Après abattage des peupliers et observation du milieu, des zones distinctes se sont dessinées, notamment une zone semi inondable.
Les prairies humides étaient autrefois très typiques de certains milieux belges mais sont aujourd’hui de plus en plus rares. La Belgique a été progressivement asséchée pour les routes, les lignes TGV, la construction, …
Pour nous donc, pas question de drainer un milieu devenu rare et pouvant amener une faune et une flore toute particulière.
Dans ce projet, la flore et la faune sont très importants afin de permettre de parvenir à une situation d’équilibre indispensable tant pour le milieu que pour la résilience du futur potager lui-même.
Tant pour la gestion des éventuels insectes nuisibles grâce aux abris et aux zones d’hébergement des prédateurs, mais aussi (concernant la flore) afin de fournir des périodes de production tampon lors d’éventuels soucis de récoltes, il est toujours possible de se rabatte sur une alimentation de plante sauvage naturellement présentes sur ce terrain.
Après le dessouchage des peupliers qui a laissé la terre à nu, nous avons creusé à l’endroit où nous avions les pieds dans l’eau.
Cela peut paraitre idiot, mais marcher sur un terrain et écouter là où ça fait floc floc…. c’est un bon moyen de creuser une mare naturelle. L’observation est d’ailleurs l’un des piliers de la création d’une zone équilibrée. à l’époque, nous ne le savions pas, comme quoi suivre son instinct peut parfois amener à de bonnes surprises.
En quelques jours, notre mare s’est remplie.
Au passage, vous noterez que nous n’avons pas enterré les souches. Il ne faut jamais rien enterrer dans le sol. Tout simplement car cela ne permettrait pas à ces éléments d’être dégradés par le milieu naturel, les insectes xylophages, les champignons et les bactéries qui nécessitent un milieu aérobie pour se développer.
Dans le sol, pas d’air, et donc pas de dégradation… Nous avons simplement empilé les souches dans le fond du terrain. Elles feront de très beaux hôtels à insectes.
Ici, vous voyez la préparation du sol quelques semaines plus tard pour y planter la haie sur le côté nord du terrain.
18 mois plus tard : après le désert, le paradis
Au cas où le côté désertique désolé des photos précédentes vous fait peur, voilà de quoi être rassuré. Ceci est une photo de l’étang 18 mois plus tard …
… bordé de sa magnifique prairie humide remplie de reines des prés.
Ses premiers habitants y ont déjà élu domicile : tritons, crapauds, grenouilles, libellules et demoiselles en tout genre, et j’en passe …
Et qu’est-ce que vous produisez ?
A l’est de l’étang se trouve une zone un peu surélevée. Plus ou moins 7 – 8 ares où nous avons choisi de démarrer un potager, installé une serre et planté quelques fruitiers.
Cette photo est prise début du printemps 2016. La majorité des bandes potagères sont encore couvertes de mulch et de couvertures de sol.
Voici une vue d’ensemble prise cet été 2016 : à l’avant de la photo le début de notre verger, à l’arrière les bandes potagères.
Pour transformer ce potager, nous avons couvert les bandes de culture avec l’excédent des broyats végétaux issu de la coupe des peupliers (voir photo plus haut).
Ce couvert se dégradant très vite, nous avons complété avec des feuilles mortes et des tontes de pelouse en grande quantité afin de démarrer les cultures.
Il faut savoir qu’à la base, le sol était très très argileux et compact, du fait du passage des machines et de son abandon durant + de 20 ans.
Il nous a donc fallu corriger cette tare afin de cultiver dans des conditions correctes.
Aujourd’hui (en 2019), nous produisions plus que ce dont nous avons besoin sur une superficie de 7 ares.
Les productions passives
Des fruits en abondance après 3 ans
Les fruitiers de port faible (afin de planter très serré) plantés en ligne Nord Sud en 2016 commencent à donner des fruits.
Nous récoltons déjà 6 variétés de pommes, 6 variétés de poires, des pêches, des nashis, des coings. Nous avons depuis ajouté un figuier, des pruniers, des cerisiers, …
Les haies de petits fruitiers débordent de
groseilles blanches et rouges, groseilles à maquereaux blanches et rouges, framboises blanches et rouges, mûres, caseilles, …
Les myrtilliers restent peu productifs pour l’instant…
Une vigne nous a donné + de 80 grappes
Nos kiwis ont particulièrement souffert de la sécheresse de 2018…
Des noisetiers viennent d’être ajoutés pour parfaire nos productions en noix.
Soit plus de 35 fruitiers plantés sur une surface de 700 m2. Nous comptons encore ajouter d’autres arbres dans les années à venir.
Nous plantons maintenant des arbres et cultures moins traditionnelles comme le sureau, l’amélanchier, l’argousier, le rosier sauvage aussi appelé églantier, les ronces sans épines, les leycesteria aussi appelés arbre aux faisans.
Bref, l’abondance est loin d’être terminée et ne fait même que commencer…
Les légumes annuels récoltés après 18 mois
Les quelques photos ci-dessous feront le travail bien mieux que quelques mots.
Les légumes d’hiver : comment manger frais, même par -10 ?
En permaculture, on mange frais toute l’année. Nous faisons très peu de conserves car c’est très chronophage, et moins bon pour la santé.
Pour arriver à cela même quand il fait -10, il faut cultiver sous protections et stocker les légumes racines comme les radis, navets, carottes, panais, betteraves, … au frais et à l’abri du gel.
Si vous souhaitez en savoir plus, lisez cet article sur la culture des légumes d’hiver, et cet autre article sur la conservation des légumes.
Et si vous avez encore faim ?
N’oublions pas la base de la base : ce qui a permis à l’homme de survivre durant des millénaires : les plantes sauvages comestibles.
Parmi celle-ci,nous consommons régulièrement : la consoude,le pissenlit,le mouron , le plantain, les lamiers, les orties, le lierre terrestre,l’ail des ours,la valériane,la reine des prés, la massette…
1 Response to "18 mois pour transformer un potager"
Belle réussite qui redonne courage…merci pour cet article.